Skip to main content
Faire un don

Russie : Le gouvernement désigne Human Rights Watch comme organisation « indésirable »

Cette mesure cynique vise à étouffer toute critique et à intimider des personnes

Le siège du Parquet général de la Fédération de Russie, à Moscou.  © 2010 Reuters/Alexander Natruskin

(Berlin, 28 novembre 2025) – La désignation par la Russie de Human Rights Watch comme organisation étrangère « indésirable », annoncée aujourd’hui par le ministère russe de la Justice, est un nouveau signe de la répression exercée par le Kremlin, a déclaré Human Rights Watch. Cette désignation équivaut à une interdiction de toute activité de l'organisation en Russie.

« Depuis plus de trois décennies, le travail de Human Rights Watch dans la Russie post-soviétique visait à inciter le gouvernement à respecter les droits humains et les libertés », a déclaré Philippe Bolopion, directeur exécutif de Human Rights Watch. « Notre travail n'a pas changé, mais ce qui a changé de manière dramatique, c'est l'adoption accélérée par le gouvernement de politiques dictatoriales, l'intensification alarmante de la répression et l'ampleur des crimes de guerre commis par les forces russes en Ukraine. »

Le bureau du Procureur général russe a pris la décision d'interdire Human Rights Watch le 10 novembre, comme l'indique le registre des organisations « indésirables » du ministère de la Justice mis à jour le 28 novembre. Les motifs officiels de cette décision n’ont pas été rendus publics.

En avril 2022, six semaines après le début de l'invasion à grande échelle de l'Ukraine par la Russie, les autorités russes avaient révoqué l'enregistrement du bureau de Human Rights Watch à Moscou, qui était opérationnel depuis 1992. Ce bureau avait alors dû fermer ses portes, mais le travail de Human Rights Watch au sujet de la Russie, qui avait débuté en 1978 durant l’ère soviétique, s’est poursuivi.

La loi sur les organisations « indésirables » est l'un des outils les plus puissants parmi l'arsenal de lois répressives adoptées par les autorités russes au cours des dernières années, afin de réduire au silence toute voix critique à l'égard du gouvernement, et de neutraliser les organisations civiques indépendantes.

En vertu de la Loi fédérale russe 129-FZ du 3 juin 2015, le parquet peut désigner comme « indésirable » toute organisation étrangère ou internationale qui porterait atteinte à la sécurité, à la défense ou à l'ordre constitutionnel de la Russie. Les organisations « indésirables » et leurs documents sont interdits en Russie. Les personnes qui continuent à collaborer avec ces organisations, que ce soit en Russie ou à l'étranger, s'exposent à des sanctions administratives et pénales, pouvant aller jusqu'à six ans de prison. Les autorités interprètent la notion de « collaboration » de manière large et arbitraire.

En 2021, Andrei Pivovarov, un activiste politique, a été condamné à quatre ans de prison pour des publications sur les réseaux sociaux qui, selon les autorités, faisaient la promotion d'Open Russia, un mouvement d'opposition politique désigné comme « indésirable ». En 2024, les autorités russes l'ont libéré et expulsé du pays. En mai 2025, un tribunal de Moscou a condamné Grigory Melkonyants, un éminent défenseur des droits humains et observateur électoral russe, à cinq ans de prison après que les autorités aient injustement assimilé le groupe russe d'observation électorale Golos au Réseau européen des organisations d'observation électorale, qualifié d'« indésirable » en 2021.

Suite aux condamnations des deux activistes, le projet « « Soutien aux prisonniers politiques » de Memorial, une importante organisation russe de défense des droits humains, les avaient qualifiés de prisonniers politiques.

Les autorités russes ont désigné au moins 280 organisations comme « indésirables » et les tribunaux ont prononcé des condamnations administratives et pénales, y compris par contumace, à l'encontre de centaines de personnes. Parmi les organisations désignées comme « indésirables » figurent d'éminentes fondations de la société civile, des organisations de défense des droits humains, des organisations environnementales, ainsi que des médias indépendants russes de premier plan. De nombreux membres et employés d’organisations ou médias qualifiés d’ « indésirables » ont dû quitter le pays et se réinstaller à l’étranger ; ces organisations ou médias ou dû s’enregistrer en tant qu'entités étrangères, afin de poursuivre leur travail.

Depuis son adoption en 2015, la loi sur les « organisations indésirables » a été critiquée à plusieurs reprises par les organismes et experts internationaux des droits humains notamment le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) et la Commission de Venise, un organe consultatif du Conseil de l'Europe. Le Comité des droits de l'homme des Nations Unies, chargé d’interpréter le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, ainsi que la Rapporteuse spéciale de l’ONU sur la situation des droits de l’homme dans la Fédération de Russie, ont exhorté les autorités russes à abroger ou réviser cette loi.

« Qualifier les organisations de défense des droits humains d'indésirables est une mesure effrontée et cynique », a conclu Philippe Bolopion. « Mais cela ne fait que renforcer notre détermination à documenter les violations des droits humains et les crimes de guerre commis par les autorités russes, et à veiller à ce que les responsables soient tenus de rendre des comptes. »

…………….

Articles

LaLibre.be  7sur7.be  LaPresse.ca

20Minutes.ch  LeDevoir.com

Your tax deductible gift can help stop human rights violations and save lives around the world.