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France : Macron devrait évoquer la répression lors de sa visite en Chine

Paris devrait mettre l'accent sur les droits humains dans ses relations avec Pékin

Le président français Emmanuel Macron et le président chinois Xi Jinping lors de la cérémonie officielle de bienvenue à Pékin, le 6 avril 2023. © 2023 Sipa via AP Images

Le président français Emmanuel Macron devrait insister en privé et en public sur l'importance des droits humains dans les relations franco-chinoises lors de sa visite en Chine du 3 au 5 décembre 2025, a déclaré Human Rights Watch aujourd'hui. La visite d’Emmanuel Macron est l'une des nombreuses rencontres de haut niveau entre les dirigeants européens et chinois dans le contexte des relations géopolitiques complexes et en pleine mutation entre l'Europe, la Chine et les États-Unis.

Le président Macron devrait montrer sa volonté de prendre des mesures concrètes en réponse à la répression croissante en Chine. Parmi les questions clés figurent les violations des droits du travail dans les chaînes d'approvisionnement chinoises, l'utilisation par la Russie de drones commerciaux produits par des entreprises chinoises pour attaquer des civils en Ukraine, et le recours par la Chine à la répression transnationale pour cibler ses détracteurs à l'étranger, notamment en France.

« Le mépris de la Chine pour les droits humains a des implications importantes pour la France, qu'il s'agisse des armes utilisées dans les attaques illégales de la Russie en Ukraine ou des chaînes d'approvisionnement abusives qui nuisent à une concurrence loyale pour les industries européennes », a déclaré Bénédicte Jeannerod, directrice France de Human Rights Watch. « Macron devrait briser les silos entre les droits humains et les autres sujets et faire preuve de leadership en abordant ces préoccupations dans les discussions politiques de haut niveau avec la Chine. »

Les efforts de la France et d'autres pays de l'UE pour faire face aux graves violations des droits humains en Chine ont été compromis par leur volonté de les dissocier des autres aspects économiques et politiques de leurs relations, a déclaré Human Rights Watch. Macron devrait reconnaître leur interconnexion et faire preuve de leadership en incluant les droits humains dans ses discussions politiques plus larges avec la Chine.

L'ouverture de la première boutique physique au monde de l’entreprise chinoise Shein à Paris a soulevé de nombreuses inquiétudes, notamment concernant le modèle commercial de l'entreprise qui reposerait sur des abus en matière de travail et des pratiques commerciales trompeuses, notamment en lien avec le travail forcé imposé par l’Etat dans le Xinjiang.

Des médias et des organisations non gouvernementales ont rapporté que les travailleurs de Shein en Chine travaillent pendant des heures excessives pour un salaire très bas. Shein a répondu qu'elle s'engageait à soutenir ses fournisseurs pour créer des conditions de travail conformes aux normes internationales en matière de santé et de sécurité, de travail et de protection sociale.

Des organisations de défense des droits humains ont également documenté le recours au travail forcé imposé par l'État chinois impliquant des Ouïghours et d'autres communautés musulmanes turciques dans les chaînes d'approvisionnement chinoises du cotonde l'automobilede l'énergie solaire et des minéraux critiques. Les Nations Unies, Human Rights Watch et d'autres organisations documentent depuis plusieurs années les crimes contre l'humanité commis par les autorités chinoises au Xinjiang, une région à majorité musulmane ouïghoure.

Une fois pleinement mise en œuvre en décembre 2027, le réglement de l'Union européenne sur le travail forcé constituera un outil important pour empêcher l'entrée sur le marché européen des produits issus du travail forcé, notamment ceux provenant de Chine. Le risque de violations des droits humains dans les chaînes d'approvisionnement montre également la nécessité de préserver la législation européenne en matière de durabilité des entreprises, que l'UE, avec le soutien du gouvernement français, cherche actuellement à affaiblir.

Macron a poussé l'UE à utiliser sa loi « bazooka commercial », l'instrument anti-coercition, pour lutter contre les pratiques commerciales coercitives de la Chine. Mais il devrait réaffirmer que le respect total par la Chine des conventions internationales récemment ratifiées par ce pays – la convention n° 29 de l'Organisation internationale du travail (OIT) sur le travail forcé et la convention n° 105 de l'OIT sur le travail forcé imposé par l'État – est essentiel pour renforcer les liens entre les deux pays.

En juin, Human Rights Watch a documenté l'utilisation par la Russie de drones commerciaux produits par des entreprises basées en Chine pour attaquer des civils à Kherson, en Ukraine. Macron devrait faire pression sur le gouvernement chinois pour qu'il veille à ce que ces entreprises de drones ne vendent pas à des entités sanctionnées et coopèrent dans les enquêtes sur les attaques illégales contre des civils en Ukraine.

La Chine a également multiplié les violations transfrontalières – connus sous le nom de répression transnationale – pour opprimer les détracteurs de son gouvernement à l'étranger et imposer un contrôle idéologique, y compris en France.

Dans une affaire récente, les autorités chinoises ont arrêté en juillet Tara Zhang Yadi, une étudiante chinoise qui étudiait en France, à son retour en Chine. Elle risque jusqu'à 5 ans de prison, voire 15 ans si elle est reconnue coupable d'être la meneuse d’actes d’ « incitation à la division du pays et à la subversion de l'unité nationale », pour avoir défendu les droits des Tibétains pendant son séjour en France. Cette arrestation s'inscrit dans le cadre d'une campagne plus large menée par le gouvernement chinois pour exiger que les institutions étrangères, y compris les musées français, désignent le Tibet sous le nom de Xizang, nom mandarin de la région.

« Des millions de personnes en Chine, en France et dans l'Union européenne continuent de subir le poids de la répression et des abus de Pékin », a déclaré Bénédicte Jeannerod. « Macron devrait cesser d'essayer de justifier le silence de la France sur les droits humains et affirmer clairement que la répression du gouvernement chinois affecte de nombreux intérêts fondamentaux de la France et de l'Union européenne, et que la Chine doit changer de cap pour maintenir des relations solides. »

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