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Mines antipersonnel : L’interdiction de ces armes devrait être renforcée

La Convention qui interdit les mines est affaiblie par le retrait de certains pays, et par de nouveaux cas d’utilisation de ces armes

Manifestation contre l’utilisation de mines antipersonnel – et la vente de ces armes par certains pays dont les États-Unis – tenue le 26 novembre 2024 à Siem Reap, au Cambodge, lors de la cinquième Conférence d’examen de la Convention d’Ottawa de 1997 sur l’interdiction de telles armes. © 2024 Campagne internationale pour l’interdiction des mines antipersonnel (ICBL)

(Genève, 1er décembre 2025) – Le traité international qui interdit les mines terrestres antipersonnel sauve des vies civiles, mais est gravement menacé par le retrait de certains pays et par de nouveaux cas d’utilisation de ces mines, a déclaré aujourd'hui Human Rights Watch à l’occasion de la publication du rapport « Landmine Monitor 2025 ». Les États parties à ce traité devraient prendre des mesures immédiates et fermes pour contrer ces développements qui mettent des vies en danger.

La couverture du rapport « Landmine Monitor 2025 », montrant des victimes de mines antipersonnel parmi les personnes qui manifestaient contre l’utilisation de ces armes, le 26 novembre 2024 à Siem Reap, au Cambodge, lors de la cinquième Conférence d’examen de la Convention d’Ottawa de 1997 sur l’interdiction de telles armes.  © 2025 ICBL

Ce rapport de 163 pages évalue la mise en œuvre et le respect de la Convention sur l’interdiction des mines antipersonnel de 1997, qui interdit de manière exhaustive l'utilisation des mines antipersonnel et exige des États parties qu'ils détruisent leurs stocks, déminent les zones touchées et viennent en aide aux victimes. 

« Les gouvernements devraient clairement condamner la décision de certains États de se retirer de la Convention sur l’interdiction des mines antipersonnel, et rejeter toute tentative de suspendre les obligations fondamentales inscrites dans ce traité lors de conflits armés », a déclaré Mark Hiznay, directeur adjoint du programme Crises, conflits et armes de Human Rights Watch et co-rédacteur du rapport Landmine Monitor 2025. « Une réponse forte est essentielle non seulement pour sauver des vies, mais aussi pour préserver le respect du droit international humanitaire et des droits humains. » 

Les mines antipersonnel tuent et blessent des personnes de manière indiscriminée. Elles sont généralement posées manuellement, mais peuvent également être dispersées par des avions, des roquettes, des tirs d'artillerie, des drones ou des véhicules spécialisés. Les mines terrestres non déminées restent dangereuses jusqu'à ce qu'elles soient localisées et détruites. La présence de mines dans des terres est susceptible de provoquer le déplacement de civils, d’entraver l'acheminement d'aide humanitaire et d’empêcher les activités agricoles.

Au 1er décembre 2025, 166 pays avaient adhéré au traité, dont les Îles Marshall et Tonga en 2025. 

Cinq États ont toutefois décidé de se retirer de la Convention en 2025, invoquant des préoccupations liées à la sécurité régionale. Le 27 juin, l’Estonie, la Lettonie et la Lituanie ont déposé leurs notifications de retrait, suivies de la Finlande le 10 juillet et de la Pologne le 20 août. Ces retraits prendront effet six mois après ces dates respectives, si ces États ne reconsidèrent pas leur position ou ne s'engagent pas dans un conflit armé pendant cette période. 

Au moins 22 États parties, le Comité international de la Croix-Rouge et la Campagne internationale pour l'interdiction des mines terrestres (ICBL), ainsi que le Secrétaire général des Nations Unies, plus de 100 lauréats du prix Nobel et d'autres personnalités éminentes ont exprimé leur profonde inquiétude face à ces retraits. Au moins 80 000 personnes à travers l'Europe ont signé une pétition exhortant ces cinq pays à ne pas se retirer du traité. 

Le 21 juillet, l'Ukraine a annoncé sa décision de suspendre ses obligations au titre de la Convention sur l’interdiction des mines antipersonnel, jusqu'à la fin de la guerre avec la Russie, une mesure qui aussi suscité des inquiétudes. Cette suspension est illégale au regard du traité, selon lequel l’interdiction du recours aux mines ne peut être levée pendant un conflit armé. Plusieurs États ont fait part à l'ONU de leurs objections à la suspension de l'Ukraine. 

La Russie a largement utilisé des mines antipersonnel en Ukraine depuis son invasion à grande échelle de ce pays le 24 février 2022, faisant des milliers de victimes et contaminant de vastes zones du territoire. Par exemple, les forces russes ont utilisé des drones quadricoptères pour disperser des mines antipersonnel dans la ville de Kherson et aux alentours, tuant des dizaines de civils et en blessant des centaines d’autres, ainsi que l’a signalé Human Rights Watch.

Au cours de l'année écoulée, des photos et des vidéos publiées sur les réseaux sociaux indiquent les forces armées ukrainiennes ont accru leur recours aux mines antipersonnel, bien que l'ampleur de cette utilisation reste incertaine. L'Ukraine a demandé et reçu des mines antipersonnel des États-Unis en novembre et décembre 2024. Des informations accessibles au public suggèrent également que l'Ukraine fabrique des mines, notamment pour les déployer à l'aide de drones.  

L'Ukraine continue d'enquêter sur les informations selon lesquelles en 2022, ses forces auraient utilisé des mines antipersonnel dans et autour de la ville d'Izioum, alors occupée par les forces russes.

Le rapport Landmine Monitor 2025 comprend également des documents attestant de la nouvelle utilisation de mines antipersonnel par les forces armées nationales de la Corée du Nord, de l'Iran et du Myanmar en 2024, et au cours du premier semestre 2025. 

En juillet 2025, lors des affrontements frontaliers avec le Cambodge, la Thaïlande a accusé les forces militaires cambodgiennes d'avoir posé des mines antipersonnel le long de la frontière, et des informations ont fait état de soldats thaïlandais blessés par des mines antipersonnel. Le Cambodge a nié ces allégations. 

Des groupes armés non étatiques ont utilisé des mines terrestres dans au moins 13 pays en 2024 et au cours du premier semestre 2025, en particulier dans la région du Sahel en Afrique, en Colombie, en Inde, au Pakistan et au Myanmar. 

Le rapport Landmine Monitor 2025 a fait état d'au moins 6 279 personnes tuées ou blessées – dont 1 945 mortellement – par des mines terrestres et de restes explosifs de guerre dans 52 pays et régions en 2024. Les civils représentaient 90 % de toutes les victimes recensées, tandis que les enfants représentaient 46 % des victimes dont l'âge avait été enregistré. 

En 2024, l'utilisation de mines par les forces armées du Myanmar a fait 2 029 victimes enregistrées dues aux mines terrestres ou aux restes explosifs de guerre, soit le nombre le plus élevé de tous les pays. Durant cette année, la junte du Myamar a posé des mines terrestres dans des maisons, des villages et des fermes, ainsi que Human Rights Watch l’a documenté. 

La Syrie est classée deuxième dans ce triste bilan, avec 1 015 personnes tuées ou blessées par des mines antipersonnel en 2024, selon les chiffres du Landmine Monitor. En avril 2025, Human Rights Watch a documenté les dommages importants causés par la contamination massive par les mines terrestres dans toute la Syrie, notamment pour les personnes déplacées qui rentraient chez elles après la chute du gouvernement de Bachar al-Assad en décembre 2024. 

Au total, 1 115 kilomètres de terres contaminées ont été déminés dans le monde en 2024, soit près de trois fois plus qu'en 2023, et 105 640 mines antipersonnel ont été détruites. 

Malgré une augmentation du financement global de la lutte antimines, principalement en faveur de l'Ukraine, le financement international de ces efforts a diminué de 5 % en 2024. Les États-Unis sont restés le principal donateur, mais leur contribution a diminué de plus d'un tiers par rapport à 2023. 

Certains États parties touchés par la contamination par les mines terrestres, en particulier ceux d'Afrique subsaharienne, ont continué à rencontrer des difficultés pour obtenir un soutien financier de la part des donateurs internationaux. 

« Le déminage des terres contaminées est essentiel pour sauver des vies, et pour permettre aux habitants déplacés de retourner à leurs terres afin d’y reprendre leurs activités en tant que moyens de subsistance », a conclu Mark Hiznay. « Les États préoccupés devraient veiller à ce que tous les pays nécessitant des opérations de déminage bénéficient d'une aide à cet égard. »

Le rapport « Landmine Monitor 2025 » est publié par la Campagne internationale pour l'interdiction des mines terrestres (ICBL), la coalition mondiale d'organisations non gouvernementales qui a reçu le prix Nobel de la paix en 1997. Human Rights Watch a cofondé cette campagne en 1992, et contribue chaque année au rapport Landmine Monitor.

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