(Washington) – L'intensification des pressions politiques exercées sur les autorités électorales au Honduras y menace le droit des citoyens de voter lors d'élections libres et équitables, a déclaré Human Rights Watch aujourd'hui.
Des élections générales seront tenues au Honduras le 30 novembre, afin d’élire le ou la président-e, les 128 membres du Congrès national et les 20 députés honduriens du Parlement centraméricain. Ces dernières semaines, le bureau du Procureur général a ouvert des enquêtes pénales visant les hautes autorités électorales. Parallèlement, l'impasse au sein du Conseil national électoral (Consejo Nacional Electoral, CNE) a retardé à plusieurs reprises l'attribution des contrats pour l'organisation des élections. Les allégations de fraude formulées par la présidente Xiomara Castro, ainsi que par des membres des partis d'opposition, sapent également la crédibilité du processus électoral.
« Les allégations de fraude potentielle, les mesures agressives prises par les procureurs et l'armée, et l'impasse politique au sein de l'autorité électorale menacent le droit des Honduriens à participer à des élections libres et équitables », a déclaré Juanita Goebertus, directrice de la division Amériques à Human Rights Watch. « Les missions internationales d'observation électorale devraient suivre de près le processus et faire pression sur les autorités honduriennes pour garantir que les conditions électorales soient libres et équitables. »
Depuis 2019, l'autorité électorale est divisée entre le Tribunal de justice électorale (Tribunal de Justicia Electoral, TJE), la plus haute autorité en matière de justice électorale, et le CNE, qui administre le processus électoral. Ces deux institutions sont composées de trois membres principaux, élus à la majorité des deux tiers au Congrès. La nomination des membres du conseil et du tribunal résulte d'un accord politique entre les trois principaux partis du pays – Partido Nacional, Partido Liberal et Partido Libre – permettant à chacun d’entre eux d’obtenir un siège dans chaque organe. Ces derniers mois, les tensions entre les membres du conseil ont toutefois paralysé le CNE.
Le 29 octobre, le procureur général Johel Zelaya a annoncé l'ouverture d'une enquête sur Cossette López, membre du conseil issue du parti Nacional, l'accusant d'avoir comploté pour manipuler les résultats électoraux. Zelaya a cité un enregistrement audio, que Cossette López affirme avoir été manipulé. La présidente Xiomara Castro a qualifié les enregistrements contestés de « complot criminel visant à provoquer un coup d'État électoral ».
Le 10 novembre, les procureurs ont ouvert une enquête contre deux juges du tribunal, les accusant d'avoir agi illégalement en approuvant une résolution alors que seuls deux des trois juges étaient présents.
Le 9 novembre, le Conseil a testé son système national de transmission des résultats préliminaires des élections le soir même du scrutin. Le conseiller Marlon Ochoa, du parti Libre, a déclaré que le test avait échoué et qu'il existait « une conspiration contre le processus électoral au sein même de l'organe électoral ».
Le chef d'état-major interarmées a demandé au Conseil de fournir à l'armée une copie du relevé des votes présidentiels le jour du scrutin. Ana Paola Hall, présidente du Conseil, a déclaré avoir rejeté cette demande. L'armée a le devoir constitutionnel de soutenir le transport du matériel électoral le jour du scrutin, mais n'a aucune autorité pour accéder aux résultats, les compter, les transmettre ou les examiner.
Le 20 novembre, les forces armées ont déposé une plainte auprès du bureau du procureur général afin d'engager une action pénale pour diffamation contre Cossette López.
Dans ce contexte de méfiance croissante et d'allégations de fraude, le rôle des missions d'observation électorale indépendantes nationales et internationales sera essentiel pour préserver la crédibilité du processus, a déclaré Human Rights Watch.
La mission d'observation de l'Organisation des États américains a exprimé son inquiétude face aux « actions et déclarations fréquentes – pratiquement quotidiennes – qui génèrent de l'incertitude et déstabilisent le processus électoral » et a fait part de ses préoccupations concernant « l'intervention judiciaire excessive » dans les élections. L'Union européenne a également déployé une mission d'observation électorale au Honduras. Le 18 novembre, l'UE a exprimé son inquiétude face aux développements susceptibles de compromettre les institutions électorales du Honduras à l'approche des élections, déclarant que les autorités et les partis politiques devaient veiller à ce que les organes électoraux puissent fonctionner de manière indépendante et transparente.
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